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292. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Les Confessions de J.-J. Rousseau. (Bibliothèque Charpentier.) » pp. 78-97

Je ne sais comment j’appris à lire ; je ne me souviens que de mes premières lectures et de leur effet sur moi… Ma mère avait laissé des romans ; nous nous mîmes à les lire après souper, mon père et moi. […] Quelquefois mon père, entendant le matin les hirondelles, disait tout honteux : Allons-nous coucher, je suis plus enfant que toi. […] Il n’a pas cette incroyable dureté (une dureté toute féodale vraiment) et ces inadvertances de cœur en parlant de ses père et mère, par exemple. Quand il en est, lui, sur les torts de son père, qui, honnête homme, mais homme de plaisir, léger et remarié, l’abandonne et le livre à son sort, avec quelle délicatesse il indique ce point douloureux ! […] Je n’ai pu indiquer qu’en courant dans l’auteur des Confessions les grands côtés par lesquels il demeure un maître, que saluer cette fois le créateur de la rêverie, celui qui nous a inoculé le sentiment de la nature et le sens de la réalité, le père de la littérature intime et de la peinture d’intérieur.

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