Mais toutes les grandes et principales parties de l’ouvrage sont de Buffon ; il y a partout la haute main ; chaque volume porte son cachet et son empreinte par quelque page immortelle ; les derniers volumes ne se distinguent des précédents et ne se font remarquer que par une ordonnance plus exacte et une plus grande perfection d’ensemble. […] Le Gazetier janséniste attaqua vivement les deux ouvrages, et Montesquieu plus violemment encore que Buffon : Montesquieu, aussitôt, prit la plume : Il a répondu par une brochure assez épaisse et du meilleur ton, écrivait Buffon à un ami (21 mars 1750) ; sa réponse a parfaitement réussi. […] « Il n’a pas mis dans ses ouvrages un seul mot dont il ne pût rendre compte. » On voit, d’après une critique qu’il fit en causant d’un écrit de Thomas, ce qu’il entendait par ces petits mots, par ces liens naturels et ces nuances graduées du discours, et quelle finesse de goût il y apportait. […] Car c’est ainsi que Buffon se corrigeait : dans son ampleur de forme, il était l’ennemi des remaniements ; comme un grand artiste, il trouvait plus simple, l’ouvrage une fois produit, de se corriger dans un ouvrage nouveau, dans un tableau nouveau, et en recommençant derechef comme fait aussi la nature. […] Le sentiment moral reste un peu blessé, au milieu de tous les étonnements qu’excite ce bel ouvrage, de le trouver si muet et si désert du côté du ciel. — Seul le Génie de l’humanité y domine et s’y glorifie dans une dernière page d’une perspective grandiose et superbe, bien que légèrement attristée49.