La mise en train des premières campagnes, les tâtonnements et les inexpériences, une opinion motivée sur la valeur de ces premiers généraux improvisés de la République, la mesure exacte et proportionnée de ces hommes tour à tour exaltés ou dépréciés, le compte rendu clair et intelligible de leur marche, de leurs essais, de leurs fautes et de leurs bévues, comme aussi de leurs éclairs de perspicacité stratégique et de talent, toutes ces parties sont rendues dans une narration bien distribuée et lumineuse, sans que le côté militaire devienne jamais trop technique, sans que la considération politique et morale des choses soit oubliée ; car ce tacticien éclairé est le premier à reconnaître que « la guerre est un drame passionné et non une science exacte 60. » Rien de tranché d’ailleurs ni d’absolu dans la pensée ni dans l’expression : la modération et un esprit d’équité président. […] Selon l’opinion de Jomini, quoique Napoléon, à partir de 1806, eût commis de grandes fautes militaires, « sa chute néanmoins avait été plutôt le résultat de ses fautes politiques et de ses erreurs comme homme d’État. » En passant condamnation sur le cadre, disons vite que dans un genre faux Jomini a montré un talent véritable, même parfois un talent d’écrivain.