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770. (1870) Nouveaux lundis. Tome XII « L’Académie française »

Il rédige le procès-verbal, et si, quand il est un peu paresseux ou trop occupé ailleurs, il ne tient qu’à lui de faire cette rédaction courte et sèche, il ne tient qu’à lui aussi (et nous en avons l’exemple en M.  […] Les novateurs ne s’y trompèrent pas : le jour de la réception solennelle du grand poète fut pour eux une fête et comme un premier triomphe : ce jour-là, s’il m’en souvient bien, plus d’un jeune romantique, introduit par les portes intérieures sous la conduite de David d’Angers, avait bravé la consigne et occupait par avance, grâce à l’heureuse licence d’alors, une place sur les bancs mêmes de l’Institut, côte à côte avec les immortels […] l’Académie est encore le lieu de France où l’on parle le mieux de littérature et où l’on en goûte le mieux toutes les aménités. » Mais dans les mois d’hiver, on est moins entre soi : les hommes politiques, absents depuis des mois et dispersés, se retrouvent, se rejoignent, s’y donnent rendez-vous comme dans un salon ; avant chaque séance, des pelotons animés se forment autour de la cheminée et dans le cercle de l’hémicycle : c’est en petit la physionomie d’une Assemblée ; et même alors que la littérature est mise en avant, quand le secrétaire perpétuel, lisant son très beau et très élégant procès-verbal, attend ou réclame le silence, de nombreux apartés se continuent à voix basse et s’obstinent parfois, bien après la séance commencée : pour quelques-uns, l’intérêt visiblement est ailleurs. — Mais bientôt, vers le milieu de l’hiver, après janvier, l’ordre des travaux, l’examen des livres à juger, dont quelques-uns curieux ou importants, la matière académique enfin, force l’attention, occupe et ressaisit tout le monde.

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