III Elles l’avaient fait pour la lutte, et dès son retour en Angleterre, il s’y était engagé tout entier, armé de logique, de colère et d’érudition, cuirassé par la conviction et par la conscience. « Aussitôt que la liberté, au moins de parole, fut accordée, dit-il, toutes les bouches s’ouvrirent contre les évêques… Réveillé par tout cela, et voyant qu’on prenait le vrai chemin de la liberté, et que les hommes partis de ce commencement se disposaient à délivrer de la servitude toute la vie humaine, … comme dès ma jeunesse je m’étais préparé avant tout à ne demeurer ignorant d’aucune des choses qui ont rapport aux lois divines et humaines…, je résolus, quoique occupé alors à méditer sur d’autres sujets, de porter de ce côté toute la force et toute l’activité de mon esprit », et là-dessus il écrivait son traité De la Réforme en Angleterre 444, raillant et combattant avec hauteur et mépris l’épiscopat et ses défenseurs. […] On essaye de se figurer la lourde éducation latine, les exercices physiques, les rudes traitements, les idées rares, les dogmes imposés, qui occupaient, opprimaient, fortifiaient, endurcissaient autrefois la jeunesse, et l’on croit voir un ossuaire de mégatheriums et de mastodontes reconstruits par Cuvier. […] J’approche, et je crois trouver l’Ève et l’Adam de Raphaël, imités par Milton, disent les biographes, superbes enfants, vigoureux et voluptueux, nus sous la lumière, immobiles et occupés devant les grands paysages, l’œil luisant et vague, sans plus de pensée que le taureau ou la cavale couchés sur l’herbe auprès d’eux.