Mais si la roue se met à tourner avec une vitesse suffisante, une sensation nouvelle s’élève, celle d’un son musical. […] La conscience ne distingue plus même vaguement les petites sensations composantes ; le son total paraît un et uni. — En même temps, il revêt une nouvelle apparence ; il semble aminci et effilé. […] Étant données deux sensations élémentaires continues, l’une précédente, l’autre suivante, toutes deux réunies forment pour la conscience une sensation totale unique que nous nommons sensation du son. — Si toutes deux sont semblables, le son est musical ; si elles sont dissemblables, le son est un bruit. — Si, dans le couple ainsi formé, les éléments sont de durée plus longue, le son est plus grave ; s’ils sont de durée plus courte, le son est plus aigu. — Dans chaque sensation élémentaire, il y a un maximum ; et à mesure que les deux maxima se rapprochent dans le temps, le son est plus uni. — Si les maxima d’un couple sont plus grands que ceux d’un autre, le son total du premier couple est plus intense que le son total du second. — Si au son total s’ajoutent des sons complémentaires moins intenses et deux, trois, quatre ou plusieurs fois plus aigus, les timbres varient avec la variation des complémentaires. — Concevez deux données, d’une part la sensation élémentaire, d’autre part cette quantité qu’on appelle le temps ; vous avez les matériaux nécessaires pour construire les sensations de son. — Deux sensations élémentaires sont discontinues ou continues, c’est-à-dire séparées par une portion appréciable ou non de cette quantité ; alors le son est nul ou appréciable. — Elles occupent des portions égales ou inégales de cette quantité ; alors le son est musical ou non musical. — Les portions ainsi occupées sont plus grandes ou plus petites ; le son est plus grave ou plus aigu. — Concevez maintenant la grandeur ou intensité de la sensation élémentaire elle-même ; avec cette nouvelle donnée, la construction s’achève. — La sensation élémentaire ayant un maximum de grandeur, les maxima de deux sensations élémentaires peuvent être discontinus ou continus, c’est-à-dire séparés par une portion de temps appréciable ou non ; alors le son est composé de portions appréciables ou uni. — Les maxima de deux sensations élémentaires sont plus ou moins grands que les maxima de deux autres ; alors le son est plus ou moins intense. — Au même son s’ajoutent divers groupes de sons moins intenses, mais dont l’acuité est un multiple de la sienne ; alors le son a tel ou tel timbre. — En sorte que toutes les différences de son, en apparence irréductibles, se réduisent à des différences de grandeur introduites dans la même sensation élémentaire, ces différences étant fournies tantôt par la grandeur ou intensité de la sensation elle-même, tantôt par cette grandeur particulière que nous nommons le temps.