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1418. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « L’abbé Galiani. » pp. 421-442

Galiani, vers ce temps, se livrait aux études les plus sérieuses : il publiait à vingt et un ans un livre sur la monnaie ; il rendait à un savant illustre, alors très vieux et presque aveugle, à l’abbé Intieri, le service de décrire en son nom, dans un petit traité substantiel et tout positif, un procédé nouveau pour la conservation des grains. […] Marmontel disait de lui également : « L’abbé Galiani était de sa personne le plus joli petit Arlequin qu’eût produit l’Italie ; mais, sur les épaules de cet Arlequin, était la tête de Machiavel. » Ce nom d’Arlequin qui revient ici est caractéristique de Galiani. […] Il fait des réductions, des suspensions, et cause la banqueroute du savoir, du plaisir et de l’esprit humain. » En philosophie, le vrai système de l’abbé Galiani est celui-ci : il croit que l’homme, quand il n’a point l’esprit alambiqué par la métaphysique et par le trop de réflexion, vit dans l’illusion et est fait pour y vivre : « L’homme, nous dit-il, est fait pour jouir des effets sans pouvoir deviner les causes ; l’homme a cinq organes bâtis exprès pour lui indiquer le plaisir et la douleur ; il n’en a pas un seul pour lui marquer le vrai et le faux d’aucune chose. » Galiani ne croit donc pas à la vérité absolue pour l’homme, à la vérité digne de ce nom : la vérité relative, qui n’est qu’une illusion d’optique, est la seule, selon lui, que l’homme doive chercher. […] On pourrait ajouter son nom à la liste des hommes célèbres morts en plaisantant.

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