La vraie poésie, celle qui seule mérite ce nom, dédaigne non seulement les idées populaires et basses, mais même les idées riantes et agréables, si elles sont triviales et rebattues. […] En poésie même, les auteurs de génie n’en font plus aucun usage ; ils n’osent toutefois le condamner ouvertement dans les vers, à cause de la possession immémoriale où il est d’y régner ; mais en prose le même droit de prescription ne les arrête pas, et ils en font justice sous un autre nom. […] Il ne donne pas même le nom de poète au versificateur qui a souvent rempli ces conditions, s’il ne les a remplies beaucoup plus souvent qu’il ne les a violées ; et tel de nos écrivains qui a excellé dans la prose, qui a beaucoup pensé dans ses vers, qui en a fait beaucoup de bons, aurait doublé sa réputation en jetant au feu les trois quarts de ses poésies, et ne donnant le reste que par fragments.