Barrière, publie un choix fait avec goût parmi les nombreux Mémoires du xviiie siècle, depuis la Régence jusqu’au Directoire ; c’est une heureuse idée, et qui permettra de revoir au naturel une époque déjà passée pour plusieurs à l’état de roman. […] Brunel, M. de Rey, l’abbé de Vertot étaient à ses pieds, et où ces bonnes dames de Grieu n’avaient d’yeux que pour elle : « Ce qu’on faisoit pour moi me coûtoit si peu, dit-elle, qu’il me sembloit être dans l’ordre naturel. […] L’inconvénient pour elle de sa première éducation et de cette culture exclusive, c’eût été plutôt, comme elle l’indique assez véridiquement, d’offrir une teinture scientifique un peu marquée, d’aimer à régenter, à documenter toujours quelqu’un auprès de soi, comme cela est naturel à une personne qui a lu l’Histoire de l’Académie des Sciences, et qui a étudié la géométrie. […] Le séjour au château de Silly chez une amie d’enfance, l’arrivée du jeune marquis, son indifférence naturelle, la scène de la charmille entre les deux jeunes filles qu’il entend sans être vu, sa curiosité qui s’éveille bien plus que son désir, l’émotion de celle qui s’en croit l’objet, son empire toutefois sur elle-même, la promenade en tête à tête où l’astronomie vient si à propos, et cette jeune âme qui goûte l’austère douceur de se maîtriser, cette suite légère compose tout un roman touchant et simple, un de ces souvenirs qui ne se rencontrent qu’une fois dans la vie, et où le cœur lassé se repose toujours avec une nouvelle fraîcheur.