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298. (1894) Propos de littérature « Chapitre IV » pp. 69-110

. — Forme virile de notre pur instinct, le rythme, léger tel qu’un souffle ou fort comme une volonté d’homme, naît de notre désir et s’identifie avec nous-même. […] Cependant la monotonie était née non pas de l’union parfaite de chaque membre de la phrase avec chaque membre de la strophe, mais de cette mesure artificielle qui divisait les syllabes six par six et douze par douze en supposant à chacune d’elles une valeur rythmique égale. […] Le vers est à sa propre vie ; sa longueur comme sa force rythmique ne dépendent plus que du sens grammatical qu’il contient — du sens plus élevé qu’il apporte par sa plastique et par tout ce qu’il suggère — et de son importance comme élément musical : il est désormais logiquement conçu. […] Une œuvre trop exclusivement subjective n’acquerra jamais la suprême beauté, celle qui naît de l’harmonie, du parfait équilibre, celle qui fait d’une statue ou d’un poème un être distinct de son auteur, vivant d’une vie surnaturelle et qui se suffit à soi-même. […] Il semble que pour les Grecs aussi, l’heure n’était pas venue ; elle aurait dû, une fois née à la vie, se prolonger éternellement, car l’idéal ne suppose point de décadence ; — au contraire leurs sculpteurs furent asservis au canon rigoureux, précis, despotique, comme leurs cités connurent l’orteil du roi de Macédoine.

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