Quelque goût personnellement qu’il eût à jouer de la hallebarde ou de la pique, il y entremêle sans cesse l’arquebuserie ; il combine l’action de ce nouveau moyen avec les autres armes de guerre, et, loin d’avoir aucun préjugé qui l’enchaîne aux us et coutumes de l’ancienne chevalerie, on le voit aussi ouvert et aussi entendu qu’homme de son temps à toute invention et à toute pratique militaire utile. […] Le premier, s’il le faut, il n’hésitera pas à donner l’exemple ; écoulons son excellent récit : Je me résolus de trouver le moyen pour faire travailler les soldats, qui fut de donner à chacun qui travaillerait cinq sous comme aux pionniers : monsieur le maréchal me l’accorda fort volontiers, mais je n’en trouvai pas un qui y voulût mettre la main. […] Montluc ne perd pas cette occasion d’exposer toute sa doctrine de stimulation militaire et ses moyens habituels d’agir sur le moral du soldat : « Ô capitaines, mes compagnons, combien et combien de fois, voyant les soldats las et recrus, ai-je mis pied à terre afin de cheminer avec eux, pour leur faire faire quelque grande traite ; combien de fois ai-je bu de l’eau avec eux, afin de leur montrer exemple pour pâtir ! […] Son grand moyen pour y arriver n’était pas seulement la libéralité et les distributions d’argent, c’était encore le soin qu’il avait de ses hommes en détail, de ne jamais leur faire faire une grande corvée sans leur faire porter pain et vin pour se rafraîchir, « car les corps humains ne sont point de fer » ; c’était surtout de donner l’exemple et de ne pas s’épargner soi-même dans les cas fatigants ou rebutants, de ne pas craindre de paraître déroger en prenant la pelle ou la pioche, comme à Boulogne ; en portant le brancard ou traînant la brouette chargée de matériaux, comme dans la défense de Verceil.