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13. (1796) De l’influence des passions sur le bonheur des individus et des nations « Section première. Des passions. — Chapitre VII. De l’esprit de parti. »

Ses amis assurent, qu’il aurait écrit contre son opinion ; qu’il l’aurait et désavouée et combattue ouvertement, sans confier à personne le secret de ses efforts, s’il avait cru que ce moyen pouvait servir à faire triompher la cause de cette opinion même. […] Pendant les siècles, déchirés par les querelles religieuses, on a vu des hommes obscurs, sans aucune idée de gloire, sans aucun espoir d’être connus, employer tous les moyens, braver tous les dangers, pour servir la cause qu’ils avaient adoptée. […] Il faut que les moyens soient de la nature de la cause, parce que cette cause paraissant la vérité même, doit triompher seulement par l’évidence et la force. […] Enfin, l’esprit de parti, doit être de toutes les passions celle qui s’oppose le plus au développement de la pensée, puisque, comme nous l’avons déjà dit, ce fanatisme ne laisse pas même le choix des moyens pour assurer sa victoire, et que son propre intérêt ne l’éclaire point, quand il est entièrement de bonne foi. […] le malheur qu’il cause serait encore possible à supporter, s’il venait uniquement de la perte d’une grande espérance ; mais par quels moyens racheter les sacrifices qu’elle a coûtés, et que devient un homme honnête, alors qu’il se reconnaît coupable d’actions qu’il condamne en recouvrant sa raison ?

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