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31. (1911) La valeur de la science « Première partie : Les sciences mathématiques — Chapitre III. La notion d’espace. »

Dans les premiers, dits mouvements euclidiens, les droites euclidiennes restent des droites euclidiennes, et les droites non-euclidiennes ne restent pas des droites non-euclidiennes ; dans les mouvements de la seconde sorte, ou mouvements non-euclidiens, les droites non-euclidiennes restent des droites non-euclidiennes et les droites euclidiennes ne restent pas des droites euclidiennes. On n’a donc pas démontré qu’il était déraisonnable d’appeler droites les côtés des triangles non-euclidiens ; on a démontré seulement que cela serait déraisonnable si on continuait d’appeler mouvements sans déformation les mouvements euclidiens ; mais on aurait montré tout aussi bien qu’il serait déraisonnable d’appeler droites les côtés des triangles euclidiens si l’on appelait mouvements sans déformation les mouvements non-euclidiens. Maintenant quand nous disons que les mouvements euclidiens sont les vrais mouvements sans déformation, que voulons-nous dire ? […] c’est parce que certains corps naturels remarquables, les corps solides, subissent des mouvements à peu près pareils. […] Localiser un objet, cela veut dire simplement se représenter les mouvements qu’il faudrait faire pour l’atteindre ; je m’explique ; il ne s’agit pas de se représenter les mouvements eux-mêmes dans l’espace, mais uniquement de se représenter les sensations musculaires qui accompagnent ces mouvements et qui ne supposent pas la préexistence de la notion d’espace.

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