Non ; il me demandait si je croyais ; je répondis : « Je prie Dieu chaque jour que ma foi augmente, mais je ne suis pas assez téméraire pour faire des raisonnements. » Il me dit : « Vous avez raison, soumettez-vous, mais examinez bien la morale, écoutez votre conscience, et Dieu vous aidera. » — Il y a plus d’un vicaire savoyard. […] Son assiduité auprès du fauteuil de son mari de plus en plus infirme et tracassier, que la vue de sa fin tourmentait et rendait plus égoïste encore, l’obligation où elle était de se séparer de ses filles qu’elle mettait au couvent, et surtout le procédé froid, compassé, moins que consolant, de son ami Margency, l’avaient amenée à un état de faiblesse physique et morale, à un découragement qui ne la laissait plus sensible qu’à une amitié dévouée et active du côté de Rousseau. […] C’est ici que nous avons à citer une fort belle lettre de Rousseau, parfaite de raison, de sagesse ; il oppose les conseils d’une morale juste et saine aux objections un peu trop délicates et raffinées, au bon sens attristé de Mme de Verdelin. […] La morale de Nicole est dépassée ; celle de Rousseau est plus vraie en ce qu’elle est plus conforme à la nature. […] » Voilà une lettre excellente de tout point, qui serait des meilleures et des plus remarquées dans la dernière partie de la Nouvelle Hèloïse ; voilà la morale du bon sens, de l’honnêteté sans subtilité et sans mysticisme.