Chez toutes deux la morale domine ; la bienséance et le devoir règlent les mœurs et le ton, Mme de Lambert, au milieu du débordement de la Régence, ouvre chez elle un asile à la conversation, au badinage ingénieux, aux discussions sérieuses : Fontenelle préside ce cercle délicat et poli, où il est honorable d’être reçu. […] Une âme faible se fût laissé gagner et eût suivi cet exemple : une âme délicate et forte se le tourna en morale et en leçon ; elle prit noblement sa revanche dans le bien. […] Droz, jugeant les écrits de Mme de Lambert24, était frappé de ce qu’une telle morale, qui prêche ouvertement l’ambition, renferme de dangereux et même d’absurde : je lui en demande bien pardon, Mme de Lambert savait qu’à la date où elle écrivait, le, danger pour cette jeunesse guerrière était bien plutôt dans le trop de dissolution et de mollesse. […] Elle veut qu’elle aussi, pour être heureuse, elle apprenne à penser sainement, à penser différemment du peuple sur ce qui s’appelle morale et bonheur de la vie : « J’appelle peuple, ajoute-t-elle, tout ce qui pense bassement et communément : la Cour en est remplie. » Ces réflexions philosophiques, qui, plus tard, passeront aisément à la déclamation et à l’excès, percent déjà à l’état d’analyse très distincte chez Mme de Lambert. […] Je viendrai avec détail un autre jour à cette seconde figure, et j’aurai encore affaire, dans un exemple plus piquant qu’on ne le suppose, à l’honnêteté, à la morale et au culte de l’esprit.