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256. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Vauvenargues. (Collection Lefèvre.) » pp. 123-143

Dans un premier livre il traite de l’esprit proprement dit, et de ses principales branches, imagination, réflexion et mémoire ; dans le second livre il traite des passions ; dans le troisième il traite du bien et du mal moral, en d’autres termes, des vertus et des vices. […] Qu’on lise les chapitres de son livre III sur le bien et le mal moral et sur la grandeur d’âme : jamais la morale de La Rochefoucauld étroitement interprétée, jamais la morale du xviiie  siècle, telle que vont la sophistiquer et la matérialiser grossièrement les Helvétius, les d’Argens, les La Mettrie et bien d’autres parmi ceux qui valaient mieux n’a été plus énergiquement et plus solidement réfutée. […] On ne voit pas qu’il ait été occupé des femmes dans les années où il écrit, et le peu qu’il en dit nous montre un homme revenu : « Les femmes ne peuvent comprendre, dit-il, qu’il y ait des hommes désintéressés à leur égard. » Il semble que, brisé avant l’âge par les maladies, il se soit retranché sur ce point jusqu’aux regrets stériles : « Ceux qui ne sont plus en état de plaire aux femmes et qui le savent, s’en corrigent. » Sans être insensible aux lumières de son temps et sans y fermer les yeux, il était loin de s’en exagérer l’importance, et il se préoccupait du perfectionnement moral intérieur, bien plus que de cette perfectibilité générale à laquelle il est si commode de croire et de s’abandonner. […]  » Telle était la conviction raisonnée de l’homme qui travailla le plus à son perfectionnement moral intérieur : rien n’eût été plus antipathique à Vauvenargues que le faux Condorcet.

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