Sage pilote dans le calme et bon pour l’intérieur, les derniers événements de l’année 1742 l’avaient montré dans toute son insuffisance à l’heure de l’orage, en présence des soudains conflits extérieurs qui changeaient la face de l’Europe. […] Il s’agissait de montrer à l’Europe, dans la guerre inégale où l’on s’était engagé sur le pied d’auxiliaires et sans volonté ni plan arrêté au début, que la France avait décidément un roi, et de porter Louis XV à faire comme ses glorieux et redoutés prédécesseurs, à paraître à la tête de ses armées. […] L’inquiétude, le trouble même que d’Argenson montra à la réception de la lettre de l’abbé, me fait croire qu’il a eu part aussi bien que tous les autres ministres à la pitoyable conduite du maréchal. » De même que le roi avait des correspondances secrètes à l’insu de ses ministres, de même les ministres envoyaient des ordres secrets à l’insu du roi ; chacun se comportait en maître dans son tripot (c’est encore une expression de Mme de Tencin, qui s’y connaît, et qui était placée au foyer de toutes ces intrigues). […] Fénelon n’était pas un flatteur ou il ne l’était qu’avec goût, lorsque dans son Mémoire sur les occupations de l’Académie française, et conseillant à la docte Compagnie de donner une Rhétorique et une Poétique, il disait : « S’il ne s’agissait que de mettre en français les règles d’éloquence et de poésie que nous ont données les Grecs et les Latins, il ne vous resterait plus rien à faire : ils ont été traduits… Mais il s’agit d’appliquer ces préceptes à notre langue, de montrer comment on peut être éloquent en français, et comment on peut, dans la langue de Louis le Grand, trouver le même sublime et les mêmes grâces qu’Homère et Démosthène, Cicéron et Virgile, avaient trouvés dans la langue d’Alexandre et dans celle d’Auguste. » Il y aurait à dire aux analogies, mais ce qui est certain, c’est que, s’il est naturel et juste de dire la langue de Louis XIV, il serait ironique et ridicule de dire la langue de Louis XV.