Un duc et pair arrive, nous tire du parterre, nous mène dans les coulisses, nous montre les gens débarrassés du fard que les peintres et les poètes ont à l’envi plaqué sur leurs joues. […] On manie son chapeau, on secoue du doigt ses dentelles, on s’appuie contre une cheminée, on regarde par la fenêtre une pièce d’eau, on calcule ses attitudes et l’on se plie en deux pour les révérences ; on se montre et on regarde ; on donne et on reçoit force embrassades ; on débite et l’on écoute cinq ou six cents compliments par jour. […] Dès sa première action Saint-Simon se montre ardent et emporté. […] Quand il peint les liaisons de Fénelon et de madame Guyon, en disant que « leur sublime s’amalgama », cette courte image, empruntée à la singularité et à la violence des affinités chimiques est un éclair ; quand il montre les courtisans joyeux de la mort de Monseigneur, « un je ne sais quoi de plus libre en toute la personne, à travers le soin de se tenir et de se composer, un vif, une sorte d’étincelant autour d’eux qui les distinguait malgré qu’ils en eussent », cette expression folle est le cri d’une sensation ; s’il eût mis « un air vif, des regards étincelants », il eût effacé toute la vérité de son image ; dans sa fougue, le personnage entier lui semble pétillant, entouré par la joie d’une sorte d’auréole. […] « La mesure et toute espèce de décence et de bienséance étaient chez elle dans leur centre, et la plus exquise superbe sur son trône. » Cette même phrase, qu’il a cassée à demi, montre, par ses deux commencements différents, l’ordre habituel de ses pensées.