Quand le rat sort de terre entre ses pattes, il n’attend pas comme dans Esope que la pauvre bête lui demande grâce ; « il montre ce qu’il est », il la fait d’abord et noblement. — Au dernier moment, le poëte se prend de compassion pour lui. […] Ils se sentent de leur condition, qui est basse, qui les met dans le fumier, dans la boue, et les assujettit aux actions comme aux instincts corporels, La Fontaine ne leur épargne pas les mots vrais, nomme les « hoquetons, les balandras, les jupons crasseux et détestables » ; il peint leurs jardins utiles, « chicorée, oseille, poireaux, maîtres choux, et tout ce qu’il faut pour mettre au potage » ; il montre le roulier embourbé qui jure et peste, et patauge dans le mortier qui enduit ses roues. […] La Fontaine les montre ayant chez eux « fortes femelles et d’assez bon aloi pour telles gens qui n’y raffinent guères. » Chacun d’eux vante la sienne comme il ferait de sa vache. « Tiennette n’a ni surot, ni malandre ; Jeanne a le corps net comme un petit denier. » Les gros mots trottent en pareil monde, et les actions brutales aussi.