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1069. (1862) Portraits littéraires. Tome II (nouv. éd.) « Bernardin de Saint-Pierre »

Aucun préjugé du monde, aucune habitude factice, aucun dogme restrictif, n’arrêtèrent, dans son essor, sa sensibilité naturelle, et il s’y abandonna. […] Cette idée, qu’enfant il avait conçue en lisant Robinson, Télémaque et les récits des voyageurs, c’était d’avoir quelque part, dans un coin du monde, son île, son Ithaque, sa Salente, où il assoirait par de sages lois le bonheur des hommes. […] Partout, dans ses voyages, son but secret et cher était de trouver, d’obtenir un coin de terre et quelques paysans pour fonder son règne heureux ; comme Colomb, qui mendiait de cour en cour de quoi découvrir son monde, Saint-Pierre allait mendiant de quoi réaliser son Arcadie et son Atlantide. […] La merveille, c’est que chez Bernardin l’innovation n’a pas le moins du monde le caractère de l’audace, tant elle est ménagée sous des jours adoucis, tant elle nous arrive dans la mélodie flatteuse. […] Combien il est touchant d’entendre ce voyageur aventureux, qui a tant couru le monde, prier M. 

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