Comme il m’aime plus que ses enfants, je l’ai attaqué du côté de la religion, et lui ai fait sentir si ce mariage (espagnol) n’était pas heureux, on s’en prendrait à lui ; que Rome donnait des dispenses auxquelles bien des honnêtes gens, dans le royaume, ne donnaient pas leur approbation ; enfin je me suis retourné de tant de manières, que le roi m’écrit qu’il a pris son parti, et qu’après avoir vaincu ses ennemis, il faut bien que tout me cède (c’est une galanterie de sa part). » Ainsi le maréchal, qui sous ses airs de soldat a des finesses de négociateur, s’est fait casuiste un moment avec Noailles ; il a eu recours à un ordre d’arguments gallicans et presque jansénistes. […] Et pourtant il y avait sous ces douceurs une épine cachée, et pas trop cachée ; le maréchal était mécontent, et ne le dissimulait pas, de la patente de généralissime accordée la veille au prince de Conti qui, ne pouvant être son émule, se montrait son envieux de gloire : et à ce propos, que l’on me permette une digression d’un moment. […] Le duc de Richelieu fut désigné pour aller en qualité d’ambassadeur extraordinaire faire la demande en toute cérémonie : on s’en serait bien passé à Dresde ; mais le choix avait été annoncé dès le premier moment, et il n’y avait pas à se dédire. […] Pour moi, qui n’ai pour toute arme que le bouclier de la vérité, l’on me craint, le roi m’aime et le public espère en moi. « Voilà, mon cher comte, un tableau de ce pays-ci… » Cette lettre essentielle, et qui est à lire tout entière, ne devait pas nous arriver : elle renfermait une injonction impérative, comme si Maurice avait reculé au dernier moment, en relisant ce qu’il avait confié au papier : « Brûlez cette lettre, je vous en conjure, en présence du roi ; je veux avoir un témoin comme lui.