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441. (1824) Ébauches d’une poétique dramatique « Conduite de l’action dramatique. » pp. 110-232

Cela dépend du naturel et des mœurs du peuple à qui l’on s’adresse ; et par le degré de sensibilité qu’il apporte à ces spectacles, on jugera du degré de force qu’on peut donner aux tableaux qu’on expose à ses yeux. […] L’effet du comique résulte de la comparaison qu’on fait, même sans s’en apercevoir, de ses mœurs avec les mœurs qu’on voit tourner en ridicule, et suppose entre le spectateur et le personnage représenté une différence avantageuse pour le premier. […] L’avarice, l’envie, l’hypocrisie, la flatterie, tous ces vices et une infinité d’autres existeront partout où il y aura des hommes, et partout ils seront regardés comme des vices ; ce qui assure à jamais le succès du comique qui attaque les mœurs générales. […] Le comique noble peint les mœurs des grands, et celles-ci diffèrent des mœurs du peuple et de la bourgeoisie, moins par le fond que par la forme ; les vices des grands sont moins grossiers ; leurs ridicules, moins choquants ; ils sont même, pour la plupart, si bien colorés par la politesse, qu’ils entrent, pour ainsi dire, dans le caractère de l’homme aimable ; ils sont d’ailleurs si bien composés qu’ils sont à peine visibles. […] La musique donne aux ridicules et aux mœurs un caractère d’inégalité, une finesse d’expression, qui, pour être saisis, exigent un tact prompt et délicat, et des organes très exercés.

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