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335. (1869) Cours familier de littérature. XXVIII « CLXVIIIe entretien. Fénelon, (suite) »

Malgré ce vice de composition, c’est le plus beau traité d’éducation et de politique qui existe dans les temps modernes, et ce traité a de plus le mérite d’être en même temps un poëme. […] La véritable imperfection de ce beau livre, ce n’est pas d’être écrit en prose, c’est d’être une copie de l’antiquité, au lieu d’être une création moderne. […] C’est un jeu de l’esprit, un déguisement de l’imagination moderne, sous des fictions et sous des vêtements mythologiques ; on y sent l’imitation sublime, mais l’imitation en toutes les lignes ; Fénelon n’y est qu’un Homère dépaysé dans un autre peuple et dans un autre âge, chantant les fables à des générations qui n’y croient plus : là est le vice du poëme, mais c’était celui du temps. […] De cette solitude sortirent des milliers de pages où respirent le génie littéraire de la plus pure antiquité et le génie moderne du christianisme, qui parlent de la divinité avec une admirable puissance d’esprit et de langage, souvent avec le plus tendre enthousiasme. […] Ce fut en peu de mois l’évangile de l’imagination moderne : il fut classique en naissant.

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