Pierre et Paul se retrouvent, comparent leurs mesures, et échangent leurs impressions. […] Ce sera l’état du système de référence, je veux dire du système où le physicien se suppose placé, à l’intérieur duquel il se voit prenant des mesures et auquel il rapporte tous les points de l’univers. […] Mais alors, Paul est bien un être vivant et conscient à l’instant où il quitte Pierre ; il est bien encore un être vivant et conscient à l’instant où il revient à Pierre ; (il resterait même un être vivant et conscient dans l’intervalle si l’on convenait, pendant cet intervalle, de laisser de côté toute considération de mesure et plus spécialement toute physique relativiste) ; mais pour Pierre physicien, prenant des mesures et raisonnant sur des mesures, acceptant les lois de la perspective physico-mathématique, Paul une fois lancé dans l’espace n’est plus qu’une représentation de l’esprit, une image — ce que j’ai appelé un « fantôme » ou encore une « marionnette vide ». […] C’est avec ces deux espèces de mesure, confondues dans le même traitement, qu’il construira une représentation scientifique du monde ; et comme il doit les traiter de la même manière, il leur attribuera la même signification. […] Lors donc qu’on déclare, dans le texte ci-dessus, qu’il y a dissymétrie entre S et S′, il est clair que cette dissymétrie ne concerne pas les mesures réellement prises en S ni les mesures réellement prises en S′, mais celles qui, du point de vue de S″, sont attribuées à l’observateur en S et celles qui, du point de vue de S″ encore, sont censées être attribuées à l’observateur en S′ par l’observateur en S.