Jamais il ne s’est vu de délire plus éclairé en apparence et mieux enchaîné, de délire plus raisonneur : « Mais ces gens-là ont beau faire, disait quelqu’un assez gaiement, ils oublient toujours que les sept péchés capitaux subsistent, et que c’est eux, sous un nom ou sous un autre, qui mènent ou agitent le monde. » On était à la veille du 20 juin (1792) et de cette insurrection hideuse à laquelle les Girondins poussaient ou prêtaient les mains, afin de se ressaisir du pouvoir. […] Il s’étonne que quelques-uns de ses collègues s’inquiètent de cette tendance des tribunes à dominer l’Assemblée : « Cette police sur les mains de la partie du public qui assiste aux séances est pour certaines gens une affaire de la plus haute importance, dit-il (31 janvier 1792) ; on croirait que leurs commettants ne les ont envoyés à Paris que pour s’en occuper. » Quand les clameurs s’élèvent sur la terrasse des Tuileries pour intimider ou stimuler les législateurs, Condorcet ne s’en plaint que très doucement (10 janvier 1792). […] Daunou, qui était comme un Condorcet un peu réduit et diminué, un Condorcet de seconde main, mais pur et irrépréhensible, et aussi plus orné littérairement.