Un lâche affront qu’il éprouva alors de la part d’un grand seigneur de la maison de Rohan le força à demander réparation les armes à la main ; la réparation lui fut indignement refusée ; il ne crut pas pouvoir rester plus longtemps dans une patrie qui lui interdisait de venger son honneur, il se retira en Angleterre, il y passa deux ans dans un petit village nommé Mandworth, aux environs de Londres. […] Quand on lit ses œuvres presque infinies, on est frappé de la supériorité de talent qui caractérise tout ce qu’il pense ou écrit depuis l’âge de soixante ans jusqu’à l’âge de quatre-vingt-quatre ans, où la mort prématurée pour lui, même à cet âge, lui arracha la plume de la main. […] Mais à peine avait-il écrit ces lignes impies qu’il rougissait de les avoir écrites et qu’il s’en vengeait en écrivant d’une main plus ferme les pages les plus solides de pensée et les plus magnifiques d’expression sur l’existence de Dieu dans ses œuvres, sur la conscience, ce code vivant de la morale une et éternelle, sur la moralité ou sur l’immoralité des actes humains, moralité ou immoralité qui suppose une peine ou une rémunération finale, et par conséquent une immortalité. […] Socrate mourant est plus beau que Voltaire riant à l’abri des Alpes et lançant des flèches sans découvrir la main. […] Bon, honnête, fidèle de cœur cependant, compatissant pour le malheur, la main large à la bienfaisance et à l’aumône, pitoyable même à l’ingratitude, souvent irrité, jamais méchant.