« Nous avons élevé cet enfant pour le roi », écrivait sa mère au ministre de la guerre en 1814 ; elle demandait l’admission de son fils dans les gendarmes de la Maison rouge ; il y entra avec brevet de lieutenant le 1er juin 1814, à l’âge de dix-sept ans. […] Peu de fortune de chaque côté : de l’un assez d’ambition, une mère ultra, vaine de son titre, de son fils, et l’ayant déjà promis à une parente riche, en voilà plus qu’il ne faut pour triompher d’une admiration plus vive que tendre ; de l’autre, un sentiment si pudique qu’il ne s’est jamais trahi que par une rougeur subite, dans quelques vers où la même image se reproduisait sans cesse. […] Le mien en était cruellement ému… » Et la mère, dans son légitime orgueil, ajoutait : « Comment, pensais-je, n’est-on pas ravi d’animer, de troubler une personne semblable ? […] Dans les trois cas sublimes, un même effet est produit par la haine orgueilleuse d’un héros, par la douleur délirante d’une mère, par le ressentiment implacable d’une amante. […] On n’entendra jamais piaffer sur une route Le pied vif du cheval sur les pavés en feu ; Adieu, voyages lents, bruits lointains qu’on écoute, Le rire du passant, les retards de l’essieu… Tout ce passage est charmant ; il y en a de très élevés : la nature parle et dit d’admirables choses dans son impassible dédain pour la fourmilière humaine : On me dit une mère, et je suis une tombe !