La table des morts et des naissances présente des résultats certains et invariables, aussi longtemps que subsiste l’ordre régulier des circonstances habituelles ; le nombre des divorces qui auront lieu chaque année, le nombre des vols et des meurtres qui se commettront dans un pays de telle population, et de telle situation religieuse et politique, ce nombre peut se calculer d’une manière précise ; et ces événements qui dépendent cependant du concours journalier de toutes les passions humaines, ces événements arrivent aussi exactement que ceux qui sont uniquement soumis aux lois physiques de la nature. […] « La loi, disait Couthon, en proposant celle du 22 prairial, accorde pour défenseurs aux innocents des jurés patriotes ; elle n’en accorde point aux conspirateurs. » N’y a-t-il pas dans cette maxime toutes les parties du discours assez bien coordonnées ? […] L’on a dit que, dans la révolution de France, des spéculateurs barbares avaient pris pour bases de leurs sanglantes lois, des calculs mathématiques, dans lesquels ils avaient froidement sacrifié la vie de plusieurs milliers d’individus, à ce qu’ils regardaient comme le bonheur du plus grand nombre. […] Il est toujours possible de prouver, par le simple raisonnement, que la solution de ces problèmes est fausse comme calcul, si elle s’écarte en rien des lois de la morale. […] Or, si vous voulez soumettre ces exceptions aux mêmes lois, si vous voulez inspirer la morale à chaque individu en particulier, dans quelque situation qu’il puisse être, vous ne pouvez trouver que dans un sentiment la source vive et constante qui se renouvelle chaque jour, pour chaque homme, dans chaque moment La morale est la seule des pensées humaines qui ait encore besoin d’un autre régulateur que le calcul de la raison.