Or, l’ouvrage de Girolamo della Corte, qui devait avoir vingt-deux livres, se trouve interrompu au milieu du vingtième livre et à l’année 1560 par la maladie de l’auteur. […] Chacun des grands drames de Shakspeare est dédié à l’un des grands sentiments de l’humanité ; et le sentiment qui remplit le drame est bien réellement celui qui remplit et possède l’âme humaine quand elle s’y livre ; Shakspeare n’y retranche, n’y ajoute et n’y change rien ; il le représente simplement, hardiment, dans son énergique et complète vérité. […] En effet, pendant que le roi confondu se livre à ses regrets, on vient lui annoncer la mort de son fils Garrinter, et Bellaria, accablée de sa douleur, meurt elle-même subitement. […] C’est à Chaucer que Shakspeare nous semble en grande partie redevable de l’idée de Troïlus et Cressida ; mais les grands traits avec lesquels il dessine les caractères de ses autres héros, Hector, Achille, Ajax, Diomède, Agamemnon, Nestor, le lâche et satirique Thersite, l’amitié d’Achille et de Patrocle, l’éloquence d’Ulysse, que la Minerve d’Homère n’eût pas si bien inspiré ; enfin, quelques traits historiques qu’on ne trouve ni dans Chaucer, ni dans Caxton, ni dans aucun des romanciers du moyen âge, font conjecturer que Shakspeare aurait bien pu connaître par la traduction quelques livres de l’Iliade. […] L’histoire sur laquelle est fondée la tragédie de Périclès, dit Malone, auquel nous empruntons ces détails, est d’une antiquité reculée ; on la trouve dans un livre jadis très-populaire, intitulé Gesta Romanorum, écrit, à ce qu’on suppose, il y a plus de cinq cents ans ; elle est également racontée par le vieux Gower, dans sa Confessio amantis, livre VIII.