Nous nous élevions contre une Cabale qui se croyoit triomphante ; nous combattions les usurpations du mauvais goût ; nous réduisions à leur juste valeur des mérites équivoques ; nous vengions le vrai mérite des atteintes de l’ignorance & de l’envie ; nous déclarions, en un mot, la guerre à la Philosophie, à la fausse Littérature, à la vanité, à la prévention, à tous les préjugés dominans ; nous rappellions les esprits à la Religion, à la raison, aux vrais principes, à la justice, à la vérité. […] Car enfin il s’agissoit de prouver au Gouvernement, qu’un Livre dont le but est de réprimer les abus de la Littérature & les scandales de la Philosophie, de rappeler aux loix de la raison & du goût ; qu’un Livre dont tout le crime est de rabaisser tous les Coryphées de la génération nouvelle, & d’attaquer sans ménagement les ennemis de l’ordre & de toute autorité, étoit une œuvre de ténebres, & méritoit l’indignation de l’autorité même. […] Pourquoi nous blâmer d’avoir loué des hommes, qui, dans le tableau de notre Littérature, jouissent d’une célébrité avouée de tous les Connoisseurs & chez toutes les Nations cultivées ? […] La Nation a déjà compris, &, sans nous, l’expérience eût suffi pour lui faire comprendre, que les inventions en Littérature sont moins des moyens de perfection & des signes de fécondité, que des causes de dépérissement & des preuves de foiblesse ; que la révolte contre les principes religieux est un symptome de vertige, & ne sauroit être le fruit du développement de la raison.