Nous nous demandons, par exemple, ce que seront l’art, la littérature, la civilisation de demain ; nous nous figurons en gros la courbe d’évolution des sociétés ; nous allons jusqu’à prédire le détail des événements. […] S’il n’y avait pas eu un Rousseau, un Chateaubriand, un Vigny, un Victor Hugo, non seulement on n’aurait jamais aperçu, mais encore il n’y aurait réellement pas eu de romantisme chez les classiques d’autrefois, car ce romantisme des classiques ne se réalise que par le découpage, dans leur œuvre, d’un certain aspect, et la découpure, avec sa forme particulière, n’existait pas plus dans la littérature classique avant l’apparition du romantisme que n’existe, dans le nuage qui passe, le dessin amusant qu’un artiste y apercevra en organisant la masse amorphe au gré de sa fantaisie. […] Mais s’il appartenait à la littérature d’entreprendre ainsi l’étude de l’âme dans le concret, sur des exemples individuels, le devoir de la philosophie nous paraissait être de poser ici les conditions générales de l’observation directe, immédiate, de soi par soi. […] L’avenir de la littérature, en particulier, les préoccupait.