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878. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Marguerite, reine de Navarre. Ses Nouvelles publiées par M. Le Roux de Lincy, 1853. » pp. 434-454

Aujourd’hui, la Société des bibliophiles, considérant qu’il n’y avait jusqu’à présent aucune édition exacte des contes et nouvelles de cette princesse, que dès l’origine les premiers éditeurs en avaient usé avec le royal auteur très librement, et qu’on ne savait où trouver le vrai texte de ce curieux ouvrage beaucoup plus célébré que lu, a pris à tâche de remplir cette lacune littéraire : elle a chargé un de ses membres les plus consciencieux, M.  […] Il y eut de son temps un immense mouvement dans l’esprit humain, une cause proprement littéraire et libérale, qui passionna les esprits et les cœurs, comme fit plus tard la politique. […] C’est même ainsi qu’elle se laissa prendre et gagner insensiblement aux doctrines des réformés qui se présentèrent d’abord à elle sous la forme savante et littéraire : traducteurs des Écritures, ils ne voulaient, ce semble, qu’en propager l’esprit et en faire mieux entendre le sens aux âmes pieuses ; elle les goûtait et les favorisait à titre de savants, les accueillait comme hommes aimant à la fois « les bonnes lettres et le Christ », ne voulait croire chez eux à aucune arrière-pensée factieuse ; et, lors même qu’elle parut détrompée sur l’ensemble, elle continua jusqu’à la fin de plaider pour les individus avec zèle et humanité auprès du roi son frère. […] Il est très vrai que Marguerite, ouverte à tous les sentiments littéraires et généreux de son temps, se comporta comme une personne qui, aux abords de 89, aurait favorisé de toutes ses forces la liberté, sans vouloir ni prévoir la Révolution.

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