Leurs erreurs peuvent intéresser l’historien littéraire ; mais comment pourraient-elles ébranler l’inébranlable vérité de la théorie, et de quelle autorité m’empêcheraient-elles, moi, critique philosophe, de considérer la comédie non dans des tragédies manquées, mais dans la pureté de sa véritable essence ? […] Le genre dramatique comprenant le tragique et le comique, le tragique doit être tout ce que n’est pas le comique, et le comique doit être tout ce que le tragique n’est pas, à peine d’éliminer l’a priori de la science, c’est-à-dire de réduire la critique littéraire à n’être plus qu’une branche de l’histoire, ou, ce qui est moins encore, qu’une arène ouverte à l’interminable lutte de tous ces goûts individuels dont la sagesse populaire a dit qu’il ne faut point disputer. […] Cette supériorité universelle si manifeste pour nous, qui connaissons la véritable idée de la comédie, n’est pas encore admise en France, où l’admiration, légitime en soi, pour un grand écrivain national, aveugle par son excès la critique littéraire, et fausse les plus simples notions d’esthétique, au point que les genres les plus opposés sont confondus, que les comédies les plus gaies sont les moins estimées, et que les plus sérieuses passent pour les plus belles. […] Si Le Misanthrope ne rentre ni dans le comique avoué, ni dans le comique d’observation, ce n’est pas une comédie de caractère, et si cette pièce n’a pas d’intrigue (de légers incidents sans liaison entre eux, la querelle littéraire avec Oronte, le jugement du procès dont on parle sans cesse, la manière dont Célimène est démasquée, ne suffisent pas à constituer une intrigue), Le Misanthrope n’est point une comédie du tout. […] Taschereau, « Ce petit trait d’histoire littéraire est original, mais controuvé.