Ce Chion était un disciple de Platon que l’étude de la vertu enflamma jusqu’au fanatisme, et qui se porta à tuer le tyran de sa patrie ; c’est une espèce de Jacopo Ortis, et ce que j’ai lu de lui et qui se rapporte à Xénophon même, est d’un ton qui simule à merveille l’atticisme. […] Certes je prise et goûte fort le joli récit traduit par Courier : il est net, proportionné, piquant, épigrammatique ; mais les additions d’Apulée ne me déplaisent pas tant ; elles m’apprennent bien des choses sur les mœurs tant publiques que privées, sur la police des villes dans les provinces, sur les travers éternels et les maladies de l’esprit humain : « Ce sont des tableaux de pure imagination, où néanmoins chaque trait est d’après nature, des fables vraies dans les détails, qui non seulement divertissent par la grâce de l’invention et la naïveté du langage, mais instruisent en même temps par les remarques qu’on y fait et les réflexions qui en naissent. » Tout cet éloge (sauf le point de la naïveté du langage), que Courier donne à son Lucius, je l’accorde à plus forte raison et je l’étends à notre Lucius latin, à notre Apulée, pour ses additions nombreuses ; lu à côté, le premier Lucius me paraît, je l’avoue, un peu sec. […] Au second siècle de notre ère, l’humanité était dans un triste état mental ; pour vous en faire idée, vous n’avez qu’à lire Philostrate ou Apulée. […] Chez les modernes, il s’est développé avec ampleur et puissance dès la première formation d’une société polie ; il a été l’un des grands instruments de l’éducation au Moyen-Âge : qu’on se rappelle les longs romans si célébrés et si lus de la Table-Ronde.