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253. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre troisième. L’esprit et la doctrine. — Chapitre I. Composition de l’esprit révolutionnaire, premier élément, l’acquis scientifique. »

Dans l’astronomie, la suite des calculs et des observations qui, de Newton à Laplace, transforment la science en un problème de mécanique, expliquent et prédisent tous les mouvements des planètes et de leurs satellites, indiquent l’origine et la formation de notre système solaire, et débordent au-delà par les découvertes d’Herschel, jusqu’à nous faire entrevoir la distribution des archipels stellaires et les grandes lignes de l’architecture des cieux. — Dans la physique, la décomposition du rayon lumineux et les principes de l’optique trouvés par Newton, la vitesse du son, la forme de ses ondulations, et, depuis Sauveur jusqu’à Chladni, depuis Newton jusqu’à Bernoulli et Lagrange, les lois expérimentales et les théorèmes principaux de l’acoustique, les premières lois de la chaleur rayonnante par Newton, Kraft et Lambert, la théorie de la chaleur latente par Black, la mesure du calorique par Lavoisier et Laplace, les premières idées vraies sur l’essence du feu et de la chaleur, les expériences, les lois, les machines par lesquelles Dufay, Nollet, Franklin et surtout Coulomb expliquent, manient et utilisent pour la première fois l’électricité. — En chimie, tous les fondements de la science, l’oxygène, l’azote, l’hydrogène isolés, la composition de l’eau, la théorie de la combustion, la nomenclature chimique, l’analyse quantitative, l’indestructibilité de la matière et du poids, bref les découvertes de Scheele, de Priestley, de Cavendish et de Stahl, couronnées par la théorie et la langue définitives de Lavoisier. — En minéralogie, le goniomètre, la fixité des angles et les premières lois de dérivation par Romé de Lisle, puis la découverte des types et la déduction mathématique des formes secondaires par Haüy. — En géologie, les suites et la vérification de la théorie de Newton, la figure exacte de la terre, l’aplatissement des pôles, le renflement de l’équateur328, la cause et la loi des marées, la fluidité primitive de la planète, la persistance de la chaleur centrale ; puis, avec Buffon, Desmarets, Hutton, Werner, l’origine aqueuse ou ignée des roches, la stratification des terrains, la structure fossile des couches, le séjour prolongé et répété de la mer sur les continents, le lent dépôt des débris animaux et végétaux, la prodigieuse antiquité de la vie, les dénudations, les cassures, les transformations graduelles du relief terrestre329, et à la fin le tableau grandiose où Buffon trace en traits approximatifs l’histoire entière de notre globe, depuis le moment où il n’était qu’une masse de lave ardente jusqu’à l’époque où notre espèce, après tant d’autres espèces détruites ou survivantes, a pu l’habiter  Sur cette science de la matière brute, on voit en même temps s’élever la science de la matière organisée. […] Dans le tableau que l’esprit humain fait de la nature, la science du dix-huitième siècle a dessiné le contour général, l’ordre des plans et les principales masses en traits si justes, qu’aujourd’hui encore toutes les grandes lignes demeurent intactes. […] S’il est hors ligne, il n’est pas hors cadre, il est un animal parmi les animaux337 en lui et chez eux, la substance, l’organisation, la naissance, la formation, le renouvellement, les fonctions, les sens, les appétits, sont semblables, et son intelligence supérieure, comme leur intelligence rudimentaire, a pour organe indispensable une matière nerveuse dont la structure est la même chez eux et chez lui. — Ainsi enveloppé, produit, porté par la nature, peut-on supposer qu’il soit dans la nature comme un empire dans un empire ?

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