Et le pauvre apprend ici à juger de son état tout autrement qu’il ne fait, et, loin de se plaindre, à savoir même bon gré à sa pauvreté, qui lui tient lieu d’asile, de port, de citadelle, en le mettant en repos et en sûreté, et le délivrant des craintes et des alarmes dont il voit que les richesses sont la cause et l’origine. » Le but qu’avait saint Chrysostome en tenant tout ce discours, n’était pas seulement d’instruire son peuple, mais de l’attendrir par le récit des maux dont il lui faisait une peinture si vive. […] Le lieu même d’où il parle, celui où on l’écoute, confond et fait disparaître toutes les grandeurs pour ne laisser sentir que la sienne. […] Fénélon, sage aimable, et rival de Nestor, Instruisoit Télémaque aux leçons de Mentor ; Bossuet adressoit, dans sa mâle éloquence, À l’ombre de Condé les regrets de la France, Et dans nos temples saints sa redoutable voix, Au nom seul du Seigneur faisoit trembler les Rois : Fléchier, moins énergique et non moins plein de charmes, Sur Turenne au tombeau faisoit verser des larmes ; Et lorsqu’en des instants de regrets et de deuil, Les chrétiens, de Louis entouroient le cercueil, Quand la nef des lieux saints répétoit leurs cantiques, Massillon écoutoit ces chœurs mélancoliques, Et sa voix s’animant à ce lugubre chant Faisoit tonner ces mots : Chrétiens, Dieu seul est grand. […] Seulement, quelquefois un cénobite en deuil Y vient de son ami visiter le cercueil ; C’est lui ; le souvenir vers ces lieux le ramène ; De tombeaux en tombeaux sa douleur se promène. […] Là, d’antiques forêts, un vallon solitaire, Où le daim vagabond paît l’herbe des tombeaux, Quelques sapins épars, un torrent dont les eaux Roulent avec fracas à travers la bruyère ; Le tonnerre grondant sous un ciel nébuleux, Et des vents et des flots le sauvage murmure ; Aux gothiques débris d’un cloître ténébreux La fougère mêlant sa funèbre parure, Tout enchante mes sens, tout en ces sombres lieux D’une sublime horreur épouvante mes yeux.