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24. (1827) Principes de la philosophie de l’histoire (trad. Michelet) « Principes de la philosophie de l’histoire — Livre second. De la sagesse poétique — Chapitre XI. De la géographie poétique » pp. 239-241

La géographie comprenant la nomenclature et la chorographie ou description des lieux, principalement des cités, il nous reste à la considérer sous ce double aspect pour achever ce que nous avions à dire de la sagesse poétique.Nous avons remarqué plus haut que les cités héroïques furent fondées par la Providence dans des lieux d’une forte position, désignés par les Latins, dans la langue sacrée de leur âge divin, par le nom d’Ara, ou bien d’Arces (de là, au moyen âge, l’italien rocche, et ensuite castella pour seigneuries). […] Sans doute il comprenait avec raison sous cette dénomination les vagabonds sans lois et sans culte qui, pour échapper aux rixes continuelles de l’état bestial, cherchaient un asile dans les lieux forts occupés par les premières sociétés, faibles qu’ils étaient par leur isolement, et manquant de tous les biens que la civilisation assurait déjà aux hommes réunis par la religion. […] Le mot hara dut signifier chez les anciens Latins, non pas le lieu où l’on élève les troupeaux, mais la victime, d’où vint certainement haruspex, celui qui tire les présages de l’examen des entrailles des victimes immolées devant les autels. […] C’est aussi de ce mot Ara, prononcé et entendu d’une manière si uniforme par tant de nations séparées par les temps, les lieux et les usages, que les Latins durent tirer le mot aratrum, charrue, dont la courbure se disait urbs (le sens le plus ordinaire de ce mot est celui de ville) ; du même mot vinrent enfin arx, forteresse, arceo, repousser (ager arcifinius, chez les auteurs qui ont écrit sur les limites des champs), et arma, arcus, armes, arc ; c’était une idée bien sage de faire ainsi consister le courage à arrêter et repousser l’injustice.

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