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10. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre VIII » pp. 70-76

Celle-ci (Mélite) a fait son effet par l’humeur enjouée de gens, d’une condition au-dessus de ceux qu’on voit dans les comédies de Plaute et de Térence. » En effet, dans cette pièce, l’auteur ne se bornait pas à produire des personnages décents, au lieu des bouffons de fantaisie : il leur donna, dit-il, un style naïf qui faisait une peinture de la conversation des honnêtes gens . […] Corneille termine son épigramme par un vers qui envoie le ferrailleur Scudéry en un lieu qui rime à duel et à cartel… Ce mot, dit Voltaire, est d’une grossièreté insupportable. Boileau, l’ayant employé depuis en parlant des vers pleins de sel de Régnier, se hâta de le remplacer par ceux-ci : Heureux si ses discours, craints du chaste lecteur, Ne se sentaient des lieux où fréquentait l’auteur ! […] Il la recommande aux Romains ; la politesse exquise de son esprit en avait conçu les lois : mais la chose était hors des mœurs générales ; le mot décence n’existait même pas ; pour l’en tenir lieu, Cicéron emploie cette locution : quod decet . […] La pureté du goût est une qualité de l’esprit ; c’est un tact qui peut, bien que difficilement, s’acquérir par l’affinage de l’intelligence : au lieu que la pureté des mœurs est le résultat d’habitudes sages, dans lesquelles tous les intérêts de l’âme sont entrés et se sont mis d’accord avec les progrès de l’intelligence, C’est pourquoi l’accord du bon goût et des bonnes mœurs est plus ordinaire que l’existence du goût sans mœurs, ou des mœurs sans goût.

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