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488. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Deuxième partie. — Chapitre XVIII. »

Avec la liberté du christianisme devait s’accroître, non pas la poésie des âmes religieuses, mais celle du culte, la pompe et l’éclat du chœur, l’ordonnance des voix qui se distribuaient le chant des hymnes. […] La ferveur naît, pour ainsi dire, du travail prolongé de la méditation ; et le coloris est donné par l’abstraction même, comme on a dû parfois de nos jours en faire la remarque sur plus d’un métaphysicien poëte, inspiré par la contemplation solitaire et la liberté de quelque secte dissidente, dans l’ample sein du christianisme moderne. […] Mais, en dépit de ces souvenirs que Synésius ne peut dépouiller, vous sentez désormais en lui l’inspiration chrétienne ; et le poëte a pu devenir évêque, surtout à cette époque d’une foi plus ardente et d’un formulaire moins rigoureux, où l’Église enveloppait dans sa communion des prosélytes parfois hétérodoxes sur quelques points, comme un vaste empire, aux premiers jours de ses victorieux agrandissements, reçoit et tolère dans son sein des cités et des territoires auxquels il laisse d’anciens usages et quelques libertés dissidentes de la règle d’obéissance commune. […] Enfin il avoue et retient les droits du mariage dans le ministère ecclésiastique ; et le deuil cruel qui plus tard désola sa vie, la mort prématurée des trois enfants issus de cette union, qu’au moment même de son inauguration épiscopale il rappelle avec amour, rien de ces malheurs et des plaintes qu’ils lui arrachent dans ses lettres ne fait supposer ni repentir ni doute sur la liberté qu’il avait gardée. […] Sans doute, dans les vers de Proclus, la liberté lyrique s’embarrasse sous les entraves de l’archaïsme et du symbole.

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