Si la pensée a eu quelque chose de trop timide au dix-septième siècle sur certaines matières de grande conséquence, le dix-huitième siècle y supplée, et rend à l’esprit humain, avec la liberté, la vérité. […] Peut-être, par une illusion du temps où il écrivait son livre, les défenseurs de la liberté du citoyen et les champions du peuple lui cachaient-ils, dans les Gracques, les factieux qui détruisaient le respect de la loi, et par qui Rome allait passer de l’âge héroïque à l’âge purement humain. […] Il vit le prince Eugène à Vienne, à Venise le fameux Law et le non moins fameux comte de Bonneval ; en Angleterre, les philosophes et les hommes d’État, à une époque de grande liberté de pensée et de parole. […] La morale de l’Esprit des lois ne l’oblige qu’à des vœux généraux d’humanité, de justice, de liberté pour tous, qui l’acquittent de toute obligation particulière. […] Il s’agit de ce principe, non pas supérieur au principe de liberté, mais apparemment plus nécessaire aux nations, puisqu’il ne souffre pas d’interruption ; il s’agit de cette force protectrice des sociétés, qui se forme de leur consentement intelligent et qui pourrait être le dernier progrès de la liberté dans ceux qui obéissent.