Tout écrivain qui a quelque chose à dire peut trouver son public, et, selon l’heureuse formule de Gaëtan Bernoville, le directeur-fondateur de ces peu frivoles Lettres dont le public en deux ans s’est tant accru : « on fait son propre public ». […] Fagus — Ces soirs nous ont voués, gens de lettres à voir Charles-Ernest ou Souday brandir, pantins sinistres Leurs noirs ongles plus noirs que leurs âmes de cuistres ! […] Tout créateur possède, avec le don d’imaginer, c’est-à-dire de voir, le don de critiquer, c’est-à-dire de situer à son plan ce qu’il a vu. — Pour quoi le succulent gnômique de l’Art poétique et délicieux chanteur du Lutrin ; pour quoi l’immense Baudelaire réalise des critiques de premier ordre ; pour quoi tant d’extravagances dans Shakespeare de ce dadais épique de Hugo, n’empêchent qu’on ne le déguste avec plus de plaisir et de fruit que l’œuvre entier du petit bonhomme envieux, Sainte-Beuve, consacré tout à rapetisser les Lettres. […] Il ne s’agissait pas, assurément, d’instituer un référendum dans toute la république des lettres, ou de décider au suffrage universel la question de savoir ce que vaut la critique actuelle et ce qu’elle devrait être. […] « Un courrier des lettres quotidien, dans chaque journal, et un feuilleton hebdomadaire ; pour les revues, des chroniques bimensuelles ; en outre, des articles de fond pour les grands livres, dans les journaux comme dans les revues. » Il semblerait que nos amis se soient donné le mot.