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650. (1909) Les œuvres et les hommes. Critiques diverses. XXVI. « Édelestand du Méril »

Édelestand du Méril, l’auteur très connu en Allemagne, à peu près inconnu en France, de la Poésie scandinave, des Essais philosophiques sur les formes et sur le principe de la versification en Europe et sur la formation de la langue française, et d’une foule d’ouvrages philologiques d’une érudition très vaste et très sûre, est un des plus acharnés travailleurs de ce siècle, qui se vante de ses travailleurs ! […] — En vain du Méril épuise-t-il toutes les ressources du génie de la recherche et du renseignement sur les pays qui sont placés le plus loin de nous, comme, par exemple, la Chine et l’Inde, il écrit bien moins l’histoire de leurs théâtres que l’histoire des impossibilités d’avoir un théâtre chez ces nations immobiles, stupéfiées par des états sociaux monstrueux… J’ai parlé plus haut d’historien humain retrouvé dans l’historien des mots, dans l’anatomiste des langues. […] Son livre, écrit du style d’un homme qui a agi sur la langue qu’il parle avec la même force qu’il a pensé sur elle, fourmille de faits et de rapprochements inattendus à enchanter les scholiastes et les bibliophiles ; mais, il faut bien que la critique le lui dise : ces détails, curieux pour des… curieux, n’apprennent, en somme, rien d’important et de nouveau et qui fasse trouée de boulet dans nos esprits et dans l’ordre de nos connaissances sur l’histoire de la comédie. […] , Édelestand du Méril, un peu trop ascète, un peu trop loup-garou de la science, descend, comme saint Siméon styliste de sa colonne, des tours Notre-Dame de son cabinet de travail dans la rue, et s’atteste pour la première fois en dehors de la langue fermée des mandarins qu’il avait jusqu’ici parlée.

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