La science morale, bien comprise, bien appliquée aux individus, a, comme toutes les sciences, ses jugements définitifs et ses résultats. […] M. de Loménie, affilié à la coterie, poussa aussi son soupir qu’il appuya de toutes sortes de réfutations et de raisonnements : essayant de m’opposer moi-même à moi-même, il ne daigna pas admettre qu’en pareille matière de jugements contemporains il vient une heure et un moment où, quand on n’est lié par rien de particulier, la vérité reparaît de plein droit et prend le pas sur la politesse. […] poursuit-il, avec la même franchise et la même sévérité de jugement je vous dirai, et en opposition avec les circonstances, que, s’il me paraît inévitable qu’un tel homme fasse quelques étourderies, il ne me paraît pas possible qu’il commette des fautes graves, des fautes qui méritent une disgrâce ; il y a, et il y aura toujours en lui, un fonds d’enfance et d’innocence qui le rendent aussi incapable de torts sérieux que de bienfaits suivis. […] J’ai une grande confiance en vos jugements ; elle est, naturellement indulgente, et vous naturellement, un peu austère (comme il est beau, comme il est bon, comme il est nécessaire et même indispensable de l’être à votre âge, ne fût-ce que pour s’accoutumera ne pas se faire bon marché à soi-même de sa propre approbation) ; mais vous êtes tous deux justes, et vous n’allez jamais chercher dans votre humeur les règles qu’il faut prendre dans sa raison. […] Mais, quand il n’est plus, il faut bien s’arrêter, sous peine d’erreur, dans cette observation dont l’objet se dérobe, et alors on fait comme pour un procès : on rassemble toutes les preuves, toutes les dépositions, et on règle, au moins dans ses articles principaux, un jugement, un Arrêt.