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154. (1899) Le roman populaire pp. 77-112

Je me disais : « Ce qu’ils échangent là contre un sou, ces pauvres, est-ce la paix, est-ce un peu de joie qui dure seulement autant que la fraîcheur d’un bonnet de tulle, est-ce de quoi les rendre meilleurs ?  […] Il n’en voit plus les joies ; il en aperçoit mieux les peines et les inégalités, qu’il exagère ou qu’il ne supporte plus. […] Elle peut être moralement indifférente, mais elle doit tout au moins récréer les âmes par le spectacle de la beauté, les alléger du fardeau de la vie, être créatrice d’une heure de joie et de repos. […] Laissons dire volontiers que les fautes de goût abondent dans le détail, et notamment dans la légende des chapitres qui s’intitulent : « Que Mgr Bienvenu faisait durer trop longtemps ses soutanes ; — Fin joyeuse de la joie ; — Vagues éclairs à l’horizon ; — Madame Victurnien dépense 35 francs pour la morale ; — Comment Jean peut devenir champ ; — Dans quel miroir M.  […] Seulement la pauvre alouette ne chantait jamais. » Il montre Cosette qui travaille, et qui regarde jouer les enfants de Thénardier, Cosette qui tremble quand on lui parle, Cosette à qui la marâtre commande d’aller, la nuit, puiser de l’eau dans la forêt, et qui a peur des branches, de l’ombre, du silence, Cosette qui rencontre dans les bois Jean Valjean, un étranger cependant, et qui a tout de suite confiance, Cosette, à qui l’inconnu, entré avec elle dans l’auberge, donne une poupée, et qui n’ose pas croire d’abord à la joie, et puis s’abandonne au rêve de ses six ans, saisit la poupée, et l’endort avec des gestes et un recueillement maternels.

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