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410. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « Lettres d’Eugénie de Guérin, publiées par M. Trébutien. »

Louise de Bayne en son château de Rayssac, passant de l’adolescence à la jeunesse, eut tout le temps de voir les saisons se succéder, les printemps courir, sa première fleur pâlir et se décolorer déjà, avant qu’un mariage sérieux la vînt prendre et enlever à sa terre natale. […] Mlle Eugénie de Guérin, cette fleur discrète de l’enclos du Cayla, a eu, je le sais, deux moments dans sa triste et longue jeunesse, le premier plus renfermé, plus doux, plus faible, plus enfant (si l’on put jamais lui appliquer un tel mot), avant d’avoir lu Lamennais, avant d’avoir lu Pascal, avant d’avoir souffert ; puis le second moment où elle est tout à fait mûre, avertie, fortifiée, frappée et brisée ; mais même dans ce second et plus ferme moment elle conserve quelque chose de parfaitement doux, de résigné et d’un peu effacé ; elle se dérobe à dessein : elle vient la dernière dans la procession des vierges. […] Que vous fussiez une sainte. » Elle choisit toujours de préférence pour confidente de ses chastes et ardents désirs cette Louise de Bayne qu’a aimée son frère, qui n’a plus seize ans, qui en a vingt déjà et plus, mais qui n’a pas changé et dont elle nous trace ce ravissant portrait en deux lignes : « C’est même air de jeunesse, même gaieté, même œil de feu.

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