Il faut nourrir cette amabilité, en avançant, de toutes sortes d’idées justes et solides sans en avoir l’air : l’homme aimable de soixante ans, même pour paraître n’en avoir jamais que vingt, ne doit pas être aimable comme on l’est à vingt, où l’on paye de mine et de jolies manières en bien des cas ; il faut, tout en conservant le désir de plaire, qu’il y joigne bien des qualités qu’il n’avait pas à cet âge ; il faut qu’en sentant toujours de concert avec la jeunesse, il ait l’expérience de plus, et qu’elle accompagne sans se marquer. […] Mais voici le second degré et la seconde saison qui fait la maturité durable, et sans quoi l’homme aimable, même défini de la façon qu’on vient de voir, court risque de mourir en nous ou de se figer avec la jeunesse : Si, ajouté encore à cela, on a des connaissances agréables de la littérature et de la langue de plusieurs pays, si l’on a de la philosophie, si l’on a beaucoup vu, bien comparé, parfaitement jugé, eu des aventures, joué un rôle dans le monde ; si l’on a aimé, ou si on l’a été ; on est encore plus aimable.