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287. (1863) Cours familier de littérature. XVI « XCIIe entretien. Vie du Tasse (2e partie) » pp. 65-128

Il se surpassa lui-même en jouant avec son génie ; on sent en lisant l’Aminta que tous ces vers inondés de lumière, de sérénité et de passion, furent écrits pour l’oreille, pour le cœur, et sous les regards d’intelligence d’une amante chaste, muette, mais adorée. […] Un tel poète faisait respirer de tels parfums pour enivrer Léonora en s’enivrant lui-même, sous le nuage qui dérobait leur intelligence à tous les yeux. […] parce qu’ils furent plus complets, parce que cette même supériorité pondérée d’intelligence, qui leur servit à créer leurs œuvres, leur servit aussi à affronter, à supporter ou à vaincre les difficultés de la vie. […] Dans le Tasse, la sensibilité et l’imagination seules étaient supérieures ; la raison, qui ne manquait pas à sa poésie, manquait à sa vie ; l’intelligence était saine, le caractère était égaré ; sa mélancolie, faiblesse de sa trame, comme dans Rousseau, obscurcissait sa raison. […] À peine le Tasse fut-il rentré dans la pleine possession de son intelligence, qu’il commença à se fatiguer de ce repos, cherché si loin et à travers tant d’aventures.

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