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1236. (1881) La parole intérieure. Essai de psychologie descriptive « Chapitre III. Variétés vives de la parole intérieure »

Elle la simule d’autant mieux que la conception du devoir est logiquement hétérogène au calcul d’intérêt qu’elle vient interrompre ; lors même que tous deux se rapportent au même problème de conduite, l’idée du devoir survient donc dans la succession psychique comme un état jusqu’à un certain point imprévu, circonstance favorable pour que son expression paraisse extérieure. […] Quoi qu’il en soit, la parole intérieure morale est incontestablement le type primitif et la première raison d’être de la prosopopée ; cette forme de l’éloquence était en germe dans les impulsions les moins obscures et les plus rationnelles des premiers orateurs ; la raison pratique avait été éloquente en eux, éloquente avec concision : l’orateur répétait ses décrets ; puis, pour faire durer l’intérêt dramatique qui s’attachait dès lors à ses paroles, et aussi pour donner à ses arguments plus de force persuasive, il continuait pendant un temps à dissimuler sa personnalité, il attribuait les motifs du décret à la même voix qui l’avait prononcé, et il les développait avec complaisance sous un nom d’emprunt. […] Cette voix peut être, comme dans Horace, la voix de l’intérêt bien entendu ; elle peut être, comme les impulsions des héros d’Homère, la voix de la passion, de la passion active et pratique ; d’autres fois, elle est véritablement la voix du devoir, l’expression d’un impératif rationnel et catégorique. […] Lélut et Moreau (de Tours) ; c’est là le seul intérêt du texte que nous mentionnons. […] Voir l’intérêt plus général de cette analyse de la parole intérieure morale pour le jeu sur les pronoms, le dédoublement du sujet et l’interaction avec le regard social au sens plus large dans le monologue intérieur (cf. notre présentation, 2e partie).

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