Mais par la manière dont vous présentez les faits, dont vous les développez, dont vous les rapprochez les uns des autres, par les grandes actions comparées aux grands obstacles, par l’influence d’un homme sur sa nation, par les traits énergiques et mâles avec lesquels vous peignez ses vertus, par les traits touchants sous lesquels vous montrez la reconnaissance ou des particuliers ou des peuples, par le mépris et l’horreur que vous répandez sur ses ennemis, enfin, par les retours que vous faites sur votre siècle, sur ses besoins, sur ses faiblesses, sur les services qu’un grand homme pourrait rendre, et qu’on attend sans espérer, vous excitez les âmes, vous les réveillez de leur léthargie, vous contribuez du moins à entretenir encore dans un petit nombre l’enthousiasme des choses honnêtes et grandes. […] Ce n’est pas tout ; observez l’influence de son caractère sur ses talents, ou de ses talents sur son caractère ; en quoi il a été original, et n’a reçu la loi de personne ; en quoi il a été subjugué ou par l’habitude la plus invincible des tyrannies, ou par la crainte de choquer son siècle, crainte qui a corrompu tant de talents ; ou par l’ignorance de ses forces, genre de modestie qui est quelquefois le vice d’un grand homme ; mais surtout démêlez, s’il est possible, quelle est l’idée unique et primitive qui a servi de base à toutes ses idées ; car presque tous les hommes extraordinaires dans la législation, dans la guerre, dans les arts, imitent la marche de la nature, et se font un principe unique et général dont toutes leurs idées ne sont que le développement.