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235. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Mirabeau et Sophie. — II. (Lettres écrites du donjon de Vincennes.) » pp. 29-50

. : ce sont de ces images qui semblent usées chez l’écrivain, mais qui, larges et pleines, et sonores, ont toujours leur effet dans la bouche de l’orateur. […] Il arrive sans effort à l’ampleur et à la solennité des images. […] Avec du crédit, il n’a rien fait pour elle ; avec de l’ordre, il l’a ruinée, sans tenir ni son état ni son rang ; il s’est isolé au milieu des siens ; il a tapissé de remords les avenues de son tombeau, et creusé celui de son nom. » L’image est grande ; pour être complètement acceptée, elle aurait besoin d’être étalée du haut de la tribune, d’être appuyée et comme démontrée du geste. […] Ceux qui ne le jugeaient que par le dehors ont souvent comparé le Mirabeau de cette époque intermédiaire à une grosse éponge qui se gonflait des idées d’autrui et de tout ce qui circulait dans l’atmosphère d’alentour ; et son père, juge sévère, même lorsqu’il était radouci, est revenu souvent sur cette image d’une grosse éponge, à laquelle il compare l’organisation avide de son fils. Il disait encore de lui, après l’espèce de réconciliation de 1781 : Tandis que mes amis, que son étrange réputation et son talent pour faire peur avaient effarouchés, l’étaient au point de me croire mort seulement à son approche, je n’ai trouvé que ce que j’avais laissé : de l’esprit autant qu’il est possible d’en avoir ; un talent incroyable pour saisir toutes les surfaces, et rien, rien du tout dessous ; et, au lieu d’âme, un miroir qui prend passagèrement toutes les images qu’on lui présente et n’en conserve pas le moindre souvenir.

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